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![]() Mai 1755 - Escadre destinée au Canada Relation du Voyage Appareillage de Brest: La flotte reste en rade jusqu'au 3 mai, contrariée par les vents, ils tournent ce jour là au N. N.E., sur les huit heures le général donne l'ordre d'appareiller et à dix heures et demi les premiers navires commencent à faire route. La flotte est répartie en deux escadres, la première sous le comte de du Bois de la Mothe destinée au Canada, la seconde sous les ordres de M. de Macnemara chargée de protéger la précédente. C'est donc une flotte de 19 vaisseaux et 6 frégates qui sortent de la rade de Brest, dont 13 vaisseaux et 3 frégates sont destinés à l'Isle Royale et à Québec. Enfin, deux frégates sont déjà parties depuis un mois pour annoncer l'arrivée du convoi ; c sont la Diane et la Fidèle, toutes deux de 24 canons. Le Formidable et l'Entreprenant prennent la tête de la flotte. Le 5 mai 3 frégates anglaises sont en vue. " deux d'entre elles suivent de loin jusqu'au 8 mai. La troisième, le Seaford fait aussitôt voile pour Penzance où elle annoncera la sortie de Brest de 19 vaisseaux et 6 frégates. La nouvelle parvient à Londres le 8 et 3 jours plus tard, l'amiral Holburne part avec 6 vaisseaux et 1 frégate pour renforcer l'escadre de l'amiral Boscawen qu'il rejoindra sur le banc de Terre-Neuve le 21 juin." Le 7 mai, à une heure de l'après midi l'Entreprenant tire un coup de canon donnant le signal aux flûtes de le suivre tandis que l'escadre aux ordres de M. de Macnemara qui était chargée d'escorter M. de la Mothe met en panne avant de retourner sur Brest. A 4 heures de l'après midi les escadres se perdent de vue. Composition de l'escadre de M. de Macnemara chargée d'assurer la sécurité de l'escadre de M. de la Mothe jusquà la haute mer: le Formidable, le Palmier, le Héros, l'Eveillé, l'Inflexible, l'Aigle, l'Améthyste, la Fleur de Lys et l'Héroïne. Du côté anglais: Les anglais sont tout à fait au courant des préparatifs français et mettent sur pied une escadre de 11 vaisseaux, une frégate et un cutter qui sous les ordres de l'Amiral Boscawen doit aller croiser au large de l'Isle Royale et surveiller l'entrée du Saint Laurent permettant l'accès à Québec. Bien que confrontés à des problèmes de recrutement des équipages, cette escadre est prête assez tôt pour mettre à la voile dès le 27 avril. Elle doit trouver sur place un renfort de plusieurs vaisseaux dont ceux qui ont transporté le major-général Braddock et ses troupes. De plus, le départ des escadres françaises, le 3 mai, n'a pas échappé à la surveillance des britanniques qui supposent que tous ces navires sont destinés à l'Amérique. Aussi, envoient ils le 11 mai à Boscawen, un second renfort de 6 vaisseaux et 1 frégate sous les ordres du contre-amiral Holburne. Traversée de l'atlantique: Dans les jours suivants la mer est calme et l'on avance lentement, le 11, l'Espérance qui naviguait sous le vent casse une des barres traversières de son mât de hune obligeant l'escadre à ralentir pour réparer. Le 25 mai, temps brumeux, le comte de la Mothe fait mettre en panne et rassemble à son bord les officiers de l'escadre pour leur indiquer leurs destinations finales, 6 des navires se rendront à Louisbourg. Cette flottille aux ordres de M. Périer de Salvert chef d'escadre est composée des vaisseaux le Bizarre, la Comète, le Défenseur, le Dauphin Royal, l'Espérance, et l'Aquilon avec les régiments d'Artois et de Bourgogne. Le 26 le brouillard s'épaissit séparant les différent navires de l'escadre, chaque bâtiment cherchant à marcher de conserve avec ceux qu'il peut renconter. "La brume devint si épaisse que de la place du timonier on ne pouvoit pas quelque fois voir le grand mât, on passa ce jour là entre des glaces plus hautes que les mâtures". Prise de l'Alcide et du Lys: Sept
bâtiments français sont cependant
aperçus et chassés. Quatre parviennent
à disparaître dans la brume, mais les anglais
rejoignent et engagent les trois autres. Arrivée à Québec: ![]() Carte tirée de l'ouvrage de Charlevoix Le reste de
l'escadre rejoint en ordre dispersé l'embouchure du
Saint Laurent. La fin de l'Espérance: L'Espérance est un 74 armé en flûte de l'escadre du Comte du Bois de la Motte qui quitte Brest le 3 Mai 1755. Commandé par le capitaine de vaisseau Louis Jubert de Bouville, il appartient à la seconde division sous les ordres de Périer de Salvert, destinée à Louisbourg sur l'Isle Royale. La destination est atteinte sans encombre. Seul le Dauphin Royal a été chassé dans les brumes du Banc de Terre-Neuve, mais plus rapide que l'ennemi, il a pu s'échapper. La mission remplie, troupes et matériels débarqués, Périer de Salvert renvoie d'abord en France la Comète commandée par Monsieur de Ruis. La frégate quitte Louisbourg le 31 août au soir et durant la nuit traverse sans se faire repérer les forces anglaises. Ruis écrit dans son rapport: " J'ay tout lieu de présumer que dans la première nuit de mon départ, j'ay passé au milieu d'une des escadres angloises qui occupoient cette côte, ayant vü des feux de chaque côté de moy. La précaution que j'avois prise de cacher entièrement les miens m'a fait traverser sans être aperçü... ". Quelques jours plus tôt, le Comte
du Bois de la Motte et toute la première division qui
a quitté Québec le 24, a longé la rive
nord du Saint-Laurent, passé l'Ile d'Anticosti puis
le détroit de Belle Isle et, naviguant plusieurs
jours parmi les icebergs, a lui aussi échappé
aux escadres britanniques. Enfin, le 19 septembre,
Périer de Salvert quitte Louisbourg avec le Bizarre,
le Défenseur et le Dauphin Royal. Dès le lendemain de leur départ, les trois vaisseaux dont seul le Bizarre est armé en guerre, sont chassés par cinq anglais. Il n'est pas question de combattre dans ces conditions, pourtant Périer de Salvert hésite lorsqu'un anglais se trouve à portée de canon. Il indique dans son rapport au ministre: " C'est dans cet instant, Monseigneur que j'ay ressenti bien amairement ma situation, car il y avoit un parti à prendre que je n'ay pas pu hasarder par prudence et sans nécessité ". Il note par ailleurs " l'affligeante nécessité où nous sommes depuis longtemps de fuir à la mer devant les anglois ou d'être accablés par le nombre ". Une fois de plus, ce sont les qualités marines des navires et sans doute aussi celles de manoeuvriers des marins français qui vont les sauver. Bien que les anglais soient situés au vent lorsque les deux divisions se découvrent à 5 heures du matin, le Défenseur et le Bizarre parviennent à gagner le vent. Ils s'échappent au plus près vers 3 heures de l'après-midi. Le Dauphin Royal, quant à lui, met une nouvelle fois à profit ses qualités au grand largue et les deux anglais qui le poursuivent lèvent la chasse à 6 heures du soir. Seul, il traverse l'Atlantique sans mauvaise rencontre et mouille en rade de l'Ile d'Aix le 11 Octobre. Le 9, le Défenseur et le Bizarre qui ont navigué de conserve, sont entrés à Brest. Enfin, l'Aquilon quitte Louisbourg le 16 octobre et regagne la France sans autre problème que le mauvais temps. Son commandant, M. Froger de la Rigaudière, fait jeter l'ancre à Belle-Ile le 6 Novembre. Les navires partis de Louisbourg et du Canada depuis août sont donc tous arrivés à bon port. Presque tous, devrait-on dire, car il faut déplorer la prise d'un petit bâtiment de transport le 20 septembre ; la gabare la Macreuse.Reste l'Espérance qui quitte l'Isle Royale le 17 octobre. Monsieur de Bouville y a laissé deux de ses canons pour aider à la défense de la colonie. Il semble que ce vaisseau ne soit pas très bon marcheur car le 11 novembre, ils se trouve encore à plus de 250 milles à l'Ouest del'Ile d'Yeu ( l'Aquilon, nettement plus petit a atteint Belle-Ile depuis déjà cinq jours ). Au matin de ce 11 novembre, vers 10 heures, l'Espérance est pris en chasse par quatre vaisseaux anglais. Ce sont le Buckingham, où flotte la marque du contre-amiral West, l'Orford, le Weymouth et l'Eagle. A 4 heures de l'après-midi, l'Orford se présente le premier sur la hanche babord de l'Espérance. C'est un vaisseau de 70 commandé par le captain Charles Steevens qui découvre les 35 canons de sa batterie tribord. Le capitaine de Bouville ne peut lui opposer que le feu de ses onze pièces babord de 18 et de 8 livres. Il fait charger à double boulets et l'action s'engage à portée de pistolet. Cela va durer 3 heures. Plus tard, les anglais exprimeront leur admiration devant le courage de leurs adversaires dans un combat aussi inégal. A 9 heures, l'Espérance est encadrée par les quatre anglais et un équipage de prise est envoyé à bord.Le surlendemain, la division du contre-amiral West est rejointe par le gros de l'escadre à laquelle elle appartient ; celle de l'amiral Byng. Ce dernier notera : " The French Ship of War that Admiral West brought into the squadron... was in the most distressed condition I ever saw a ship, extremely leaky and not able to carry any sail, having only her lower masts standing and foretopmasts.... ". En réalité, on comptera onze coups ayant porté sous la ligne de flottaison. Les pompes ne parviennent pas à compenser les entrées d'eau et pourtant il faut tenir le vaisseau à flot car la tempête empêche tout abandon. Enfin, le 15, français et anglais sont évacués alors que l'Espérance est en train de sombrer. C'est le troisième navire de guerre que la France a donc perdu avant la déclaration de guerre. Cela représente environ 5% des vaisseaux qu'elle est en mesure d'aligner au début du conflit, ce qui est loin d'être négligeable.
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