Expédition du Maréchal de Richelieu contre Minorque en 1756

A l'entrée de la Guerre de Sept Ans, l'île de Minorque était une possession britannique. En 1708, en pleine Guerre de Succession d'Espagne, le général Stanhope s'empare de l'île alors espagnole, cette conquête sera ratifiée en 1713 dans l'article 12 du traité d'Utrecht-Radstatt.

En 1756, se pose aux français le problème de la conquête de l'île dans le contexte des opérations militaires de la seconde moitié du 18 me siècle. Ce sera un des éléments que la diplomatie mettra sur le tapis des négociations de paix qui commenceront dès le milieu de cette guerre.

En effet, en prenant Minorque, les français y resteront jusqu'à la paix du traité de Paris en 1763 où il devront la restituer à la Grande-Bretagne.

Ainsi, dans ce contexte, le 18 avril 1756, les vigies anglaises du château de Saint Philippe du port Mahon (capitale de l'île) découvrent à l'horizon pas moins de 197 voiles, celles de la flotte française d'invasion, commandée par l'amiral de La Galissonière à bord du navire amiral le Foudroyant, accompagné du duc de Richelieu commandant l'expédition et de son état-major composé de la fine fleur de la noblesse française de l'époque.

Dans cette campagne, accompagnant le duc on pouvait compter trois princes : Charles de Beauvau et son frère Louis-Eugene ainsi qu'Auguste-Elizabeth de Wirtemberg ; sept comtes : Egmont, Pignatelli, Grimaldi, Carne-Marcein, Maillebois, Luppe, La Serre et Modave ; onze marquis : Pusignieu, Puisegur, Roquepine, Fremeur, Monteynard, Saint Aignan, Talaru, Chabert-Cogolin, Laval-Montmorency, Mesnil, Briqueville et Monti ; le baron de Chabaríe et le vicomte de Lannion futur gouverneur de l'île.

Accompagné, à bord des transports de troupes, de 8 brigades de 3 bataillons chacune formées des régiments d'infanterie française de Bretagne, Briqueville, Cambis, Hainaut, La Marche, Médoc, Rohan, Royal, Royal Comtois, Royal Marine, Talaru, Soissonais et Vermandois et un régiment italien : Royal Italien. Ainsi que quelques troupes de l'Artillerie et du Génie.

A la mi-journée le 19 avril, les troupes françaises d'invasion débarquent sans rencontrer de résistance dans le port de Ciudadela, dans la partie occidentale de Minorque, les habitants les reçoivent en vainqueurs. Richelieu, informé que les anglais et le gouverneur Blakeney s'étaient retranchés dans le fort de Saint Philippe (à l'autre extrémité de l'île), il parcourt à marche forcée les 42 kilomètres qui le sépare de la capitale qui se prépare à soutenir le siège.

Après avoir établi les campements autour du fort commencèrent les travaux de construction des batteries de siège. Rapidement apparut une première difficulté majeure : le terrain de l'île particulièrement rocheux ne permettait pas de construire des parallèles à la sape. En outre la terre et le bois n'étaient pas suffisants pour construire parapets et fascines. Enfin de l'extérieur, arrive la nouvelle qu'une flotte britannique commandée par l'amiral Bing a appareillé de Gibraltar pour porter secours à Minorque.

En effet, le 19 mai, l'escadre anglaise arrive dans la rade de Mahon, ou le français de la Galissonière se présente en bataille, les anglais font retraite sur Gibraltar sans combattre, abandonnant la garnison de Minorque à son sort. Cette déroute coûtera la vie à l'amiral anglais. Il sera fusillé sur le pont de son navire après avoir été condamné à mort par un conseil de guerre.


Titre de l'archive: "El ataque francés de 1756 al castillo de San Felipe de Mahón, dibujado por el geógrafo Tomás López."

 

Ainsi, ayant la maîtrise des mers, Richelieu pouvait continuer les travaux de préparation du siège. La difficulté que représentait la dureté du terrain qui comme nous l'avons déjà dit ne permettait pas de creuser de tranchées fut résolue en installant les batteries derrière les maisons des faubourgs de Saint Philippe (qui constituaient les logements des soldats et de leur famille à proximité du fort et que les anglais n'avaient pas eut le temps de détruire). De plus, cela permit d'installer l'artillerie à 150 toises du château, distance bien suffisante pour ouvrir une brèche dans la muraille.

Dès la mise en place des batteries de siège, elles commencent à faire feux contre le fort, débutant le siège. A la fin juin, Richelieu est informé qu'une nouvelle escadre anglaise est partie de Gibraltar pour porter secours à Minorque. Le temps presse et il se doit de jouer son va-tout, plus partisan des théories de Memo von Coehoorn qui exige plus de vigueur dans le siège des forteresses que de celles du conservateur maréchal de Vauban qui préfère éviter les effusions de sang, Richelieu décide de prendre d'assaut la forteresse.

L'attaque commence dans la nuit du 27 juin, et le hasard voulut que, après avoir subit de lourdes pertes par l'explosion des mines, les grenadiers français atteignent le chemin couvert du fortin d'Argyll et ont la surprise de faire prisonnier l'ingénieur de la forteresse Cuninghame et le commandant en second Jeffereyes. Au vue des évènements, perdant toutes les lignes de défenses extérieures, les britanniques se réfugient au centre de la citadelle, le gouverneur Blakeney décide alors de se rendre après un conseil de guerre où la majorité des sous-officiers se prononcent pour la capitulation dont les 12 articles seront signés le 28 juin au coucher du soleil.

A partir de ce moment et pour sept années, Minorque sera sous la domination de la fleur de lis.

 

José L. Terrón Ponce