GÉNÉRALITÉ SUR L'UNIFORME ET L'ÉQUIPEMENT DU FANTASSIN:

La tenue et l'équipement du fantassin de la guerre de sept ans sont principalement réglés par l'ordonnance du 20 avril 1736 et divers règlements et instructions ultérieures en particulier celles du 19 janvier 1747, du 17 février 1753, du 9 décembre 1758 qui précisent les détails de certains équipements ou les modifications apportées.

 

Vers la fin de la guerre de sept ans, essayant de tirer les leçons de ce désastreux conflit, Choiseul par une vague de réformes entreprend de réorganiser et moderniser l'armée. Pour l'infanterie c'est au travers de l'ordonnance du 10 décembre 1762 que se fait cette restructuration. Elle ne fait dans certains cas qu'officialiser des modifications déjà adoptées. Elle ne s'appliquera qu'après la fin de la guerre et de façon progressive pour les régiments.

Concernant l'uniforme, cette ordonnance de 1762 est principalement caractérisée par une réduction de la taille des parements, le port permanent des basques retroussées maintenues par une agrafe, la généralisation du revers sur l'habit et enfin la confirmation du collet de couleurs distinctive.

 

Au fur et à mesure du renouvellement des tenues de 1736 à 1762, la coupe de l'uniforme se modifie évoluant vers un habit de plus en plus militaire se distinguant nettement des vêtements civils. L'habillement des troupes est renouvelé tout les 3 ans, le fourniment et le porte fourniment n'est renouvelé que tout les 6 ou 7 ans.

Les distinctives des différents régiments sont complexes. Elles portent sur les couleurs affectées à chaque régiment ( parements, collet, revers ), sur la forme des pattes de poche et sur la couleur or ou argent des boutons et du galon de chapeau. La répartition de la couleur distinctive est fixée par l'ordonnance de 1736 " la veste sera croisée, tout en gris blanc dessus et dessous, ainsi que le juste-au-corps, sans que sous quelque prétexte que ce soit il y puisse être employé d'autres couleurs, les parements des manches seulement, continueront d'avoir les couleurs affectées à chaque régiment ... ". Malgré ce texte officiel on constate que les culottes et plus encore les vestes de couleur persistent dans nombreux régiments. Avec la mode le collet apparaît ( vers 1748-1750 ), il prend la couleur distinctive et sera officialisé par l'ordonnance de 1762. Les pattes de poches par leurs formes, leurs dispositions et le nombre des boutons permettent une grande variété de dessins distinctifs.

Les sources principales consultées sont les États Militaires de Lémau de la Jaisse de 1730 à 1745 puis les États Militaires de Roussel et Montandre à partir de 1757, le dictionnaire militaire de La Chesnaye des Bois édition de 1759, le manuscrit de Perpignan et le manuscrit de Herman daté de 1757 conservé au Musée de l'Armée et qui reproduit les régiments d'infanterie.

 

II.1. UNIFORME DE LA TROUPE:

Chapeau, cocarde et cheveux

Le chapeau est fait de laine noire, ceux que doivent avoir les sergents doivent être de bonne laine d'agneau de Berry ou autre qualité équivalente et ceux des soldats de laine ordinaire d'agneau. L'arrêt du Conseil d'État du 10 août 1700 impose que soit marqué sur le cordon une marque à chaud, portant la première lettre du nom et le surnom du fabricant et à la suite sur la même marque de la lettre T pour signifier troupe. Suivant la mode prussienne les cornes du chapeau se verticalisent, en particulier celle du devant. Il est bordé d'un galon or ou d'argent selon la couleur du bouton, le galon se pose à cheval sur le rebord du chapeau. Le chapeau se porte la corne antérieure tournée vers la gauche.

La cocarde est faite de ruban ou en papier elle est blanche ou noire au XVIII ème siècle, elle se glisse sous une ganse d'or ou argent maintenue par un petit bouton. Beneton " depuis le siècle de Louis XIII la rose de ruban blanc au chapeau à été constamment la marque des guerriers." Mais de nombreuses de peintures du temps nous montrent des cocardes noires, il est probable que des cocardes blanches et des cocardes noires seront toutes deux portées, mais on ne sait rien des circonstances qui font porter l'une ou l'autre dans tel ou tel régiment. Le manuscrit d'Herman donne des cocardes noires. D'autres documents donnent vers 1735-1740 des cocardes blanches, en particulier pour les régiments de la Maison du Roi. Cette cocarde royale et par là nationale peut changer en cas de guerre, pour marquer ses alliances les armées alliées adoptent une cocarde commune ainsi Beneton dans son Traité des marques nationales de 1739 indique " Pendant la guerre commencée avec le siècle ou nous sommes, les cocardes dans les armées de France et d'Espagne combinées ensembles, étaient blanche et rouges. L'électeur de Bavière qui pris parti avec nous dans cette guerre faisait porter à ses gens des cocardes blanches et bleues et le duc de Mantoue qui entra aussi dans l'alliance des deux couronnes, donna à ses gens des cocardes blanches, rouges et jaunes mêlant ce jaune qui est la livrée des Gonzagues aux couleurs de la France et d'Espagne". Ceci est sans doute vrai pour les armées combinées ou des éléments de différentes nations combattent ensemble. Ainsi pendant la guerre de sept ans par l'alliance avec l'impératrice Marie Thérèse pouvait on voir porter des cocardes blanches et vertes, le vert étant la couleurs de la Hongrie, par les unités combinées telles celle en 1757 commandée par Hildenbourghausen et ...

 

Le bonnet d'ourson des grenadiers apparaît vers 1750 et tend à se généraliser vers 1755. Toutefois ce n'est pas encore un attribut constant et nombreuses sont les compagnies de grenadiers coiffées du chapeau. Commence également à apparaître sur l'avant du bonnet une plaque de métal aux armes du roi ou chargé d'une grenade, là encore son introduction n'est pas encore réglementée et est inconstante. Le fond du bonnet en arrière est recouvert par une flamme de tissu de couleur rouge.

 

Les soldats ont en outre un bonnet de travail, bien différent de celui des dragons. Il est fait de tissu de la couleur du fond de l'habit, bordé ou non d'un galon de la couleur distinctive, agrémenté d'une houppe de même couleur. L'avant est fait comme une sorte de visière relevée fixe qui peut être chargé d'une ou trois fleurs de lis dessinée par un fil brodé de la couleur distinctive. A partir du règlement de 1767 le bonnet prend le nom de pokalem et la plaque sur le devant est en pont-levis, c'est à dire mobile.

 

Ce n'est que pour les revues que les cheveux sont poudrés et roulés sur les tempes, pendant les campagnes ils sont " au naturel ". Le premier texte qui en fixe leur coupe apparaît dans l'ordonnance du 25 avril 1767: " les cheveux des soldats seront retroussés en cadenette sous le chapeau, les faces seront roulées sur une lame de plomb ou carton ". Cette prescription ne fait qu'entériner une mode apparue vers 1755. Théoriquement seuls les grenadiers portent la moustache, mais si c'est la règle les exceptions sont nombreuses comme l'a relevé Corvisier. A noter que c'est au médecin du régiment qu'il incombe de s'assurer du rasage régulier des soldats.

Habit, veste et culotte

L'habit ou juste-au-corps est fait de drap gris-blanc. Il ferme sur le devant par 9 à 12 gros boutons qui s'arrêtent au niveau des poches. Les pans se portent généralement retroussés et maintenus par une agrafe. Cette agrafe est parfois ornée d'une grenade de couleur pour les grenadiers comme figuré sur un tableau d'Horace Vernet peint en 1756 qui nous montre des grenadiers du régiment Royal Comtois. Dans certains régiments l'habit s'agrémente de revers qui s'arrêtent au niveau des poches, ces revers ou bavaroises vont être généralisés par l'ordonnance de 1762. La doublure est le plus souvent de la couleur distinctive ce qui donne des retroussis de couleur. Le collet est porté par tous les régiments depuis les années 1748-1750 environ, toutefois dans l'état des troupes envoyées au Canada en avril 1755 ( La Reine, Artois, Bourgogne, Languedoc, Guyenne, Béarn ) on remarque l'absence de collet pour ces régiments.

La couleur des boutons est la même que celle du galon de chapeau et constitue un des éléments distinctifs des régiments. A noter que le régiment de Cambis à la particularité de posséder des boutons alternativement or et argent, tandis que le régiment de Flandre à des boutons jaunes et blancs ( de cuivre et d'étain ) mêlés.

 

La veste est plus courte de 9 pouces que l'habit. Théoriquement elle est blanche pour tous les régiments depuis le règlement de 1736, mais bien souvent de couleur distinctive comme le montrent les documents de l'époque. La veste est doublée de serge blanche. Les manches sont fendues à leurs extrémités et fermées par 1 ou 2 petits boutons. La veste se ferme sur le devant par 10 à 12 petits boutons sur un ou deux rangs jusqu'à la hauteur des poches. Le plus souvent la veste a des " poches ordinaires " , c'est à dire des poches et des pattes de poches en travers à 3 petits boutons. Pour certains régiments la veste s'agrémente de boutonnières ou brandebourgs. Il faut enfin noter la particularité du régiment de Rohan-Rochefort qui possède des revers rouges sur la veste.

 

Par l'ordonnance de 1736 " tous les soldats, sergens, caporaux doivent s'entretenir une cravate de crépon noir " qui se noue autour du cou.

 

Les culottes sont de drap gris blanc fermées sur le genou par 5 petits boutons placés à l'extérieur. Certains régiments, et en particulier les régiments étrangers portent des culottes de la même couleur que la veste.

Guêtres, bas et chaussures.

L'ordonnance indique " au lieu de bas qui sont fournis aux sergens, on fournit une paire de guêtre à chaque caporal, anspessade, soldat et tambour ". Les guêtres sont de toile forte, fermées sur l'extérieur par de petits boutons d'os, et serrées sous le genou par une jarretière à boucle de laiton. L'été elles sont faites de toile de couleur blanche et l'hiver elles sont en tricot noir.

 

Les souliers sont fait de cuir noirci à boucle. Ils sont à la charge du soldat qui reçoit en contre partie une gratification. C'est toutefois le service de l'intendance qui en assure l'approvisionnement.

Enfin notons pour compléter que le fantassin porte une chemise de toile forte, un caleçon et des bas.

Équipement et buffleterie:

 

L'ordonnance de 1747 indique que le ceinturon est à un seul pendant avec son porte baïonnette. Le ceinturon se porte sur l'habit fermé et retroussé, pendant les chaleurs il est permis de le porter sur la veste et d'avoir l'habit déboutonné.

 

Le règlement du 19 janvier 1747 précise encore: " Il sera fourni à chaque soldat une demi-giberne à poche de vache rouge ou noire, ayant un patron de cartouche à 19 ou 20 trous. La bandoulière de buffle, bien cousue sans clous ni piqûre, avec deux cordons attachés au bas de la cartouche pour porter un fourniment à poire de bois ( une poire à poudre ou pulvérin)." La demi-giberne se porte à droite.

La généralisation de la cartouche à balle amène à augmenter la demi-giberne à 30 coup comme le précise La Porterie.

L'usage de la poire à poudre ou pulvérin devient moins fréquent. Cette poire à poudre est ordinairement en bois, recouverte de cuir bouilli et fermée par un bouchon de bois. Elle se porte attaché à deux cordons fixés sous la cartouche ou suspendue par une petite sangle de cuir passée en bandoulière. Il existe également des pulvérins fait de corne, garnis de cuivre et munis d'un bouchon doseur.

 

La cartouche ou giberne du soldat est encore garnie d'un tire-boure, d'un essuy pierre, d'une pierre de rechange et de trois coups en balle et poudre.

 

Chaque compagnie d'infanterie possède 10 outils: 3 pelles, 3 pioches, 2 haches, 2 serpes.

Leurs dimensions sont réglées par l'instruction pour l'infanterie de 1753 :

- la pelle mesure 7 pouces 4 lignes (19,8 cm) de haut sur 6 pouces 9 lignes (18,2 cm) de large par le haut et 5 pouces 6 lignes (14,8 cm) au tranchant, la douille fait 3 pouces 6 lignes (9,4 cm), le manche à 1 pied 12 pouces de long (65 cm).

- la pioche 9 pouces 6 lignes (25,7 cm) de long, 2 pouces 6 lignes (6,7 cm) de large du côté du tranchant et le manche 2 pieds 3 pouces 4 lignes (74 cm).

- la serpe 8 pouces 7 lignes (23,2 cm) de long, 3 pouces ( 8,1 cm) de large par le bout et 2 pouces 2 lignes (5,8 cm) du côté du manche qui aura 4 pouces 9 lignes (12,8 cm).

- la tête de la hache aura 2 pouces (5;4 cm) en tour sur la distance de la tête au saillant sera de 7 pouces 2 lignes (19,4 cm), et la largeur du taillant de 3 pouces 10 lignes (10,4 cm), le manche (non compris le fer) aura 1 pied 10 pouces (59,6 cm).

Ces outils sont portés à tour de rôle par les soldat au moyen d'étuis de peau de vache non noircis, fermant chacun à deux boucles et attachés à une courroie large de 2 pouces.

 

La compagnie se répartie en outre une gamelle et un bidon de fer blanc, une marmite et son couvercle. Le havresac qui contient les effets et les provisions du soldat est fait de coutil ( toile forte ), doublé de peau, à une ou deux bretelles de cuir.

Armement

Le fusilier est armé du fusil à baïonnette et de l'épée.

L'augmentation de la puissance de feu par généralisation de la cartouche à balle et surtout l'introduction de la baïonnette au début du XVIII ème siècle rend l'épée inutile et gênante :" les épées sont si encombrantes à la guerre et si rarement utiles que la plupart des soldats les jettent ou les vendent pendant la campagne " écrit Héricourt (p 133 ). D'après l'Encyclopédie Méthodique de 1787 elle disparaît lors de la guerre de sept ans " Ce n'est que depuis le commencement de la dernière guerre qu'on à négligé de les porter et qu'insensiblement elles furent supprimées ". Cette suppression ne deviendra officielle que par l'ordonnance du 25 janvier 1767.

L'épée du fusilier mesure 26 pouces (70,4 cm) de lame avec un talon de 2 pouces, la lame en langue de carpe est à deux tranchants jusqu'à la pointe. Sa monture est dite à la mousquetaire avec pas d'âne et coquille, vers 1740 apparaît une monture simplifiée semblable à celle de la cavalerie.

La baïonnette mesure de 17 à 18 pouces de long ( 48 cm ), compris la douille.

Le fusil de notre soldat est du modèle 1754, il est fabriqué sous la direction de l'État dans les manufactures de Charleville, Maubeuge et Saint Étienne. Ce fusil n'a subi que quelques modifications depuis les modèles de 1728-29, puis celui de 1746 et enfin le modèle de 1754. Ce dernier mesure 1m60 dont 1m18 pour le canon et pèse 4,280 kg. ( pour plus d'information voir l'indispensable ouvrage de J.Boudriot sur les armes à feu réglementaires ).

La cartouche est faite d'un étuis de parchemin ou de papier qui contient la poudre et au sommet duquel on place la balle.

Le grenadier est armé du fusil avec sa baïonnette et d'un sabre recourbé à double monture et d'une hache. Il est muni d'un ceinturon, d'un fourniment et d'une giberne à 19 trous, ces deux dernières pièces pendent à un buffle d'un pouce et demi de large . La petite hache se porte grâce à un brelage cousu sur la courroie de la giberne. Depuis l'ordonnance du 19 janvier 1747 il y a dans chaque compagnie de grenadiers 10 soldats porte-hache qui porte un hache plus grosse, à long manche et ressemblant à une cognée.

Distinctive des grades des sous-officiers: caporaux, ansepessades et sergents

 

Le règlement du 19 janvier 1747 fixe les distinctives suivantes:

- les ansepessades ont les parements des manches bordées d'un galon de laine jaune ou blanc selon la couleur des boutons.

- les caporaux ont les parements des manches bordées d'un galon de laine de la couleur des boutons et garnis de trois brandebourgs de laine ( les brandebourgs sont placés soit parallèlement, soit perpendiculairement au bord du parement).

- les sergents ont les parements des manches garnies de trois agréments ou d'un large bordé d'or ou d'argent fin. Les sergents sont de plus armés d'une pertuisane ou hallebarde de 6 pieds et demi de long ( 2m10 ). Cette tradition persistera jusqu'à la fin du 18ème siècle malgré le règlement qui remplace la hallebarde par un fusil. Toujours pour le sergent, par l'Ordonnance du 9 décembre 1758 concernant " l'armement des officiers et sergens des compagnies de fusiliers de ses troupes et des cartouches ou demi-gibernes dont ils devront être pourvus " il est précisé: " La cartouche ou demi-giberne des sergens sera percée de douze trous, elle sera couverte d'une patte de peau de vache rouge ou noir, et garnie d'une fleur de lis empreinte en or ou argent sur le milieu. Le cordon avec sa traverse et porte bayonnette sera de buffle jaune piqué; il aura un pouce et demi de largeur, et sera garni d'une boucle.... La cartouche du sergent de grenadiers sera seulement garnie d'une grenade empreinte en or ou argent."

 

II.2. UNIFORMES DES TAMBOURS ET DES FIFRES

Depuis l'ordonnance du 18 janvier 1683 il y a un seul tambour par compagnie et un seul fifre par régiment d'infanterie qui est attaché à la compagnie colonelle. Leur uniforme est réglé par l'ordonnance de 1736 " il sera employé à l'habillement des tambours les même quantités et qualités de draps, d'étoffes et de boutons qu'à ceux des soldats, avec la petite livrée en brandebourgs, jusqu'à la poche seulement, tant dans les régiments de Sa Majesté que dans les régiments qui portent celles des colonels."

Nous ne décrirons ici que la livrée royale qui est portée par la majorité des régiments ( la livrée des régiments de gentilhomme lorsqu'elle est connue sera décrite avec les distinctives de chacun des régiments). Dans la petite livrée le galonnage est disposé sur toutes les coutures de l'habit, sur le bord de l'habit et aux boutonnières de l'habit et des poches, il borde les revers s'il y en a.

Notons que dans l'état général des approvisionnements des six bataillons qui sont embarqués pour le Canada en 1757, l'uniforme des tambours des six régiments Artois, La Reine, Béarn, Bourgogne, Languedoc et Guyenne est le identique pour tous les régiments sçavoir: habit bleu sans collet avec parements rouges, galonné de la livrée Royale, veste et culotte rouges, le chapeau bordé d'or faux et ce quel que soit la couleur du métal affecté au régiment ou il sert. Économie et simplicité ont donc prévalu pour le renouvellement de l'uniforme de ces troupes envoyées aux colonies.

Les tambours ont une caisse de bois de chataigner, parfois au naturel comme pour le régiment Béarn mais le plus généralement de la couleur distinctive de l'habit avec des cercles soit au naturel soit peints de couleur. Ils sont alors soit bleu, rouge ou bicolore en bandes alternées rouges et blanches ou bleus et blanches.

Les caisses des régiments français sont ornées d'un motif standard identique à celui du régiment Royal Roussillon conservé au Musée de l'armée. Il est constitué d'un écus central ovale chargé des armes de France surmonté d'une couronne royale pour les régiments Royaux et provinciaux. Chargé des armes du prince ou du noble propriétaire de son régiment surmonté d'une couronne héraldique correspondant à son titre, et de six drapeaux au couleurs du régiments peints sur la caisse, passés en sautoir derrière l'écus.

Le collier de tambour est de buffle blanchi dans la plupart des cas, parfois bordé d'un galon de livrée. Les baguettes mesurent environ un pied et demi.

 

Les caisses des tambours des régiments étrangers ont une décoration qui leur est propre et malheureusement souvent inconnue, quelques exemplaires se trouvent dans des musées étrangers. Tel celui du régiment suisse de Courten conservé au musée de Valère à Sion en Suisse . Il est du même modèle que celui de l'infanterie française, savoir: un écu central aux armes de Courten surmonté d'un cimier et d'un lambrequin.

 

II.3. UNIFORMES, ÉQUIPEMENTS ET ARMEMENT DES OFFICIERS: colonel, lieutenant colonel, capitaine, lieutenant, major.

Uniforme des officiers:

 

L'uniforme des officiers est semblable à celui de la troupe ( ordonnance du 10 avril 1737 ) mais en drap plus fin, défense est faite d'y ajouter des galons et boutonnières. Mais comme pour la cavalerie le règlement est peu respecté comme le montrent les tableaux et portraits de l'époque, encore que ce galonnage non réglementaire se limite à la veste.

L'officier porte le plus souvent des bas et des chaussures, toutefois en campagne comme l'écrit Hérouville " les officiers d'infanterie ne doivent point se présenter pendant la campagne aux officiers généraux sans être guêtrés ". Pour le service à cheval on peut penser qu'ils utilisaient des bottines de cuir souple comme celles des dragons.

Le hausse-col est la distinctive principale de l'officier d'infanterie de toutes les armées de cette époque qu'il soit Anglo-Hanovrien, Prussien, Autrichien, ou Français. C'est un croissant de métal doré ou argenté, timbré aux armes royales, ou à celles du Prince, il s'attache autour du cou avec deux cordonnets d'or. Héricourt précise que les officiers major de l'infanterie ne portent point le hausse-col.

 

Distinctives des grades des officiers:

 

En 1759 sous le ministère du maréchal de Belle-Isle sont introduites les épaulettes comme marque distinctives des grades. Il est difficile de savoir dans quelle mesure le port ces épaulettes sera adopté, et quels sont les régiments qui l'appliqueront avant la fin de la guerre de sept ans. Le texte de cette ordonnance en date du 12 janvier 1759 ne nous est pas parvenu mais il était probablement semblable à celui du règlement du 10 décembre 1762 dont voici le détail:

-le colonel à deux épaulettes d'or ou d'argent selon la couleur du bouton, avec franges riche à noeuds de cordelières ou graines d'épinards.

-le lieutenant-colonel porte à gauche une épaulette d'or ou d'argent selon la couleur du bouton, avec franges à noeuds de cordelières, et à droite une contre-épaulette sans franges.

-le major à deux épaulettes en or ou argent à franges flottantes, sans noeuds de cordelière ou graine d'épinard.

-le capitaine et l'aide-major ont à gauche une épaulette à franges flottantes et à droite une contre épaulette.

-le lieutenant ne pourra porter l'épaulette pleine en or ou argent; elle sera sur le dessus, losangée de carreaux de soie jaune ou blanche, de sorte que, si le bouton est jaune, le fond de l'épaulette sera en or losangé de soie blanche; si, au contraire, le bouton est blanc, le fond de l'épaulette sera en argent losangé de soie jaune; la frange de soie sera mêlée d'or ou d'argent selon la couleur du bouton.

 

-le sous lieutenant ou cornette portera l'épaulette à fond de soie jaune ou blanche, selon la couleur du bouton, avec des carreaux d'or ou d'argent en opposition avec la couleur du fond de l'épaulette.

-le porte drapeau aura l'épaulette à fond de soie jaune ou blanche liserée d'or ou d'argent, suivant la couleur du bouton.

 

Armement et équipement des officiers:

 

Les officiers sont armés d'une épée et du fusil ou de l'esponton.

L'esponton est là encore une des marques distinctives des officiers dans toutes les armées d'Europe des 17 et 18 ème siècle. C'est une pique longue de 7 pieds et demi à 8 pieds ( 2,43m à 2,59m ) compris la lame en feuille de saule.

Depuis le début du siècle l'esponton est progressivement remplacé par le fusil. Tout d'abord par l'ordonnance du 1er décembre 1710 le lieutenant de grenadiers ou de fusiliers est doté du fusil tandis que le colonel, le lieutenant-colonel et le capitaine conservent l'esponton. Puis en 1754 tout les officiers de grenadiers se voient attribuer un fusil à la place de l'esponton. Enfin par l'ordonnance du 31 octobre 1758 concernant les officiers et sergents des compagnies de fusiliers " elle porte que dorénavant tout les officiers de compagnies Française ou Étrangère sera armé d'un fusil fabriqué dans les manufactures de Saint-Étienne, Charleville ou Maubeuge et d'une bayonnette de la manufacture d'armes d'Alsace. Le fusil de l'officier sera de 4 pied de long du calibre de 16 pour recevoir la balle de 18, il pèsera 7 livres au plus, armé de sa bayonnette qui aura 8 pouces et demi de lame évidé. Le fusil du sergent sera semblable à celui du soldat. "

 

Le fusil d'officier est un modèle 1754 allégé mesurant 1m46 dont 1m pour le canon et ne pesant que 2,750 Kg avec une platine du modèle 1754 plus fine et une baïonnette de 21,6 cm. La baïonnette se porte chez les officiers, fixée à une traverse cousue au-dessus de la cartouche comme pour la hache des grenadiers.

 

On profite de l'attribution du fusil aux officiers de fusiliers pour adopter un règlement plus précis pour l'équipement des officiers et sous-officiers d'infanterie par l'ordonnance du 9 décembre 1758 qui fixe " l'armement des officiers et sergens des compagnies de fusiliers de ses troupes et des cartouches ou demi-gibernes dont ils devront être pourvus ". "La cartouche ou demi-giberne à l'usage des officiers, sera percée de huit trous, du diamètre et de la profondeur convenables pour recevoir des cartouches à balles; cette cartouche sera recouverte d'une patte de maroquin rouge ou noir, elle sera ornée d'une fleur de lis brodée en or ou argent sur son milieu, suivant l'uniforme de chaque corps, doublée et bordée d'une peau blanche. Le cordon qui portera cette cartouche avec sa traverse sera de buffle blanc piqué; il aura un pouce et demi de largeur, et sera garni d'une boucle.... La cartouche à l'usage des officiers des compagnies de grenadiers ne différera pas de celle de l'officier des compagnies de fusiliers, qu'en ce qu'elle sera garnie d'une grenade brodée en or ou argent, au lieu d'une fleur de lis". Les collections publiques et privées conservent des gibernes d'officier non conformes aux règlements, richement décorées avec une patellette de cuir parfois recouverte de velours chargées des armes du colonel propriétaire. Il en est ainsi d'une giberne d'officier du régiment de Penthièvre et d'une autre du régiment de Navarre ( MA 1430 ) ou encore du régiment allemand de Lowendhal que reproduit M.Pétard dans sa série d'études sur les buffleterie militaires. Sans doute s'agit-il de gibernes d'officiers de l'état-major des régiments, colonel, lieutenant-colonel et major. Chaque officier s'adresse à un fourbisseur privé pour la réalisation de son épée et de son équipement ce qui donne une variété et surtout une richesse qui dépend avant tout de la fortune de l'officier en question.

La dragonne de l'épée est faite de fil d'or ou d'argent selon la couleur du bouton, mêlé de fils de la couleur distinctive du régiment. De même le ceinturon et fait de cuir plus ou moins brodé ou gaufré.

Équipage des officiers montés

 

Il s'agit des officiers d'infanterie de l'état-major des régiments. A cette période il n'y à pas de texte officiel qui règle l'équipage des officiers montés.

Mais on peut s'en faire une idée d'après les tableaux de l'époque, en particulier, il existe un tableau de J.Vernet intitulé le port d'Antibes daté de 1756 conservé au Musée de la Marine, qui montre deux officiers montés du régiment Royal Comtois. La sellerie est à la royale et ressemble à celle des dragons; quand aux couleurs et au galonnage l'un des officiers à les housses et les chaperons à fond bleu bordés d'un large galon d'or, l'autre à un équipage à fond rouge bordé d'un galon or, rappelons que le régiment Royal Comtois à des boutons jaunes. Le galon devait probablement être argent pour les régiments avec boutons blancs. Cet équipage est à la charge de l'officier.

 

III. LES DRAPEAUX ET LES FANIONS:

Les drapeaux sont fait de taffetas, les motifs son peint sur la toile et non brodés comme ceux de la cavalerie, d'où leur plus grande fragilité. Ils sont en règle carrés de 160 à 190 cm environ avec une croix de 30 à 36 cm, plus rarement rectangulaires. La hampe mesure de 9 à 10 pieds (2,92m à 3,24m) au naturel. La hampe est ferrée au bas et terminée en haut par une pointe simple dorée. Elle est parfois terminée par une pointe en forme de fleur de lis comme aux Gardes Suisses. Les drapeaux des régiments français se distinguent par leur croix blanche et une écharpe blanche. Sur le drapeau colonel cette croix est marquée par une piqûre. L'écharpe est large d'environ 20 cm pour 70-80 cm de long, nouée à la hampe avec une cordelière de fils de soie blanche au drapeau colonel et des couleurs du drapeau mêlées pour ceux d'ordonnance. Jusqu'à la Régence la couleur des drapeaux change à peu près chaque fois qu'un nouveau colonel obtient la charge d'un régiment, tout au moins pour les régiments de gentilhomme. A partir de 1717, sous la Régence, cette pratique devient interdite pour les régiments français.

 

L'ordonnance du 10 février 1749 fixe le nombre des drapeaux des régiments français à 2 par bataillons dont un blanc à la compagnie colonelle.

Les Suisses ont un drapeau par compagnie, chaque régiment est de 2 bataillons de 6 compagnies soit 12 drapeaux au total par régiment dont un drapeau colonel.

Depuis 1753 les régiments d'infanterie allemande ont 2 drapeaux par bataillons.

Les Écossais, Irlandais, Italiens et Liégeois ont la même dotation que les troupes française soit deux drapeaux par bataillons.

En ordre de bataille, le règlement du 18 février 1749 stipule que les drapeaux se placent au centre du bataillon et gardés par les sergents. Au campement ils sont placés à 5 pas ( 5m environ ) en avant des premières tentes, vis à vis de la grande rue du centre. Le drapeau colonel et placé entre la colonelle et la lieutenance, les drapeaux d'ordonnance se placent; l'un entre les deux compagnies du centre et l'autre entre les deux dernières.

Les fanions sont de petits drapeaux destinés à repérer le campement ou les bagages des différents régiments. Pendant cette période on retrouve au moins deux types de fanions.

-les fanions de campement, décrits par l'ordonnance de 1753 pour l'infanterie et l'instruction pour la cavalerie de 1755. Ils servent à l'alignement des tentes des compagnies. L'instruction pour la cavalerie de 1755 précise que la banderole du fanion sera d'un pied quarré et d'étoffe de laine des couleurs affecté au régiment, dont le nom y sera écrit, les fanions fixés sur deux fiches blanches ferrées, de 7 pieds (230 cm) de haut. Bien que l'ordonnance pour l'infanterie de 1753 se contente de préciser que le nom du régiment doit être écrit sur ce fanion, il était vraisemblablement lui aussi de la couleur distinctive.

-le fanion de bagages est décrit ainsi par La Chesnaye " porté à la tête des bagages par un valet d'infanterie ou de cavalerie, il est fait de serge aux couleurs de la livrée du brigadier ou de celle du commandant du corps. .

IV. TACTIQUE , FORMATION ET ÉVOLUTIONS DE L'ARME

IV.1. LES GRADES ET LES FONCTIONS

Au cours de la guerre de sept ans, Choiseul désirant intéresser les officiers au recrutement des troupes, impose à tous les officiers se rendant en semestre, c'est à dire en permission, de recruter un certain nombre d'hommes. Ainsi la correspondance des frères Prunelle nous apprend que Prunelle de Saint Didier cornette dans Royal dragon doit recruter trois hommes et n'en ramenant qu'un seul il se voit retenir cent écus sur son traitement, et son frère Prunelle de Roisson lieutenant au régiment d'infanterie de Berry préfère ne pas partir en semestre afin d'éviter l'amende.

 

IV.1.1 Les officiers de l'état-major des régiments:

 

Le colonel est propriétaire de son régiment, le prix de chacun de ces régiments varie selon sa place hiérarchique, de plus pour obtenir le régiment il faut obtenir l'agrément du Roi. Ici encore les relations et l'argent conditionnent l'obtention ou non du régiment. Sous le ministère de Chamillard on assiste à une multiplication des charges vénales pour renflouer le trésor. C'est ainsi que se multiplient les " colonels à bavette ", et Voltaire de brocarder la chose en 1725 faisant dire à son héros dans l'Indiscret " Colonel à quinze ans, je pense avec raison

Que l'on peut à trente ans m'honorer du bâton"

D'ailleurs le Roi n'est pas en reste pour montrer le mauvais exemple puisqu'il donne en 1758 le régiment Royal Carabiniers à son petit-fils qui n'a que trois ans alors qu'au même moment son ministre de la guerre le maréchal-duc de Belle Isle propose qu'on ne puisse admettre au commandement d'un régiment un officier qui n'ai déjà servit pendant sept années dont deux en qualité de cornette ou de lieutenant et cinq comme capitaine.

Lorsqu'il commande effectivement son régiment, ce qui fort heureusement est encore le cas le plus général au cours de la guerre de sept ans, le colonel lors d'une bataille se place trois pas en avant des capitaine avec le hausse-col et l'esponton à la main.

 

Le lieutenant colonel occupe une charge non vénale, elle est en règle donnée par le Roi à des capitaines compétents mais pas assez fortunés pour acquérir celle de colonel. Dans la pratique ce sont eux qui vont faire marcher les régiments.

 

Le capitaine est le pivot du régiment par la responsabilité qu'il a des recrues. Mais il en représente également le principal défaut. A ce propos voici ce qu'écrit en décembre 1757 le comte de Saint Germain " la méthode de mettre les troupes au compte du capitaine est pernicieuse, et tant qu'elle subsistera, il n'y aura pas de subordination. Les capitaines ne font leurs recrues qu'à force d'argent, parce qu'ils courent sur le marché des uns des autres. On ne veut pas perdre une recrue qui coûte beaucoup, et pour la conserver on évite de lui donner le moindre déplaisir, on lui permet tout. Il ne s'agit que de pouvoir présenter des hommes au commissaires; mais comme la discipline pourrait leur déplaire et en faire déserter, on n'en exige aucune. Le lieutenant d'une compagnie n'oserait dire un mot à un soldat: ce serait couper un arbre fruitier dans la métairie du capitaine." Un élément important de la réforme de Choiseul sur l'organisation des régiments d'infanterie est la suppression la charge du recrutement des hommes par le capitaine, cette charge incombant dorénavant à l'État.

De même Choiseul supprimera le concordat, l'avancement se faisant à l'ancienneté, certains officiers fortunés s'entendaient avec des capitaines ou des lieutenant moins riches pour obtenir, qu'ils se retirent du service moyennant une somme d'argent, permettant ainsi une rapide avance hiérarchique.

 

IV.1.2.Les bas-officiers:

 

Le sergent ou sergens a un rôle administratif et un rôle d'instructeur. Il est chargé du contrôle de sa compagnie, date d'enrôlement, les termes et prix de l'engagement, l'état des malades, des absences ... . Il doit connaître le maniement des armes et les évolutions, manoeuvres qu'il doit apprendre aux soldats de sa compagnie.

 

Le grade de fourrier est crée par l'ordonnance de 1758, il est chargé de l'administration de la compagnie soulageant en cela le sergent qui peut se consacrer à l'enseignement militaire.

 

Les caporaux aident le sergent dans sa tache. Il doit être suffisamment instruit pour avoir le contrôle des troupes par compagnie et par chambrée. Celui qui est de semaine contrôle l'habillement et l'armement des soldats. Le caporal poste et lève les sentinelles, il doit veiller au bon ordre dans le corps de garde, il commande une escouade, reçoit le mot des rondes lorsqu'elles passent près de son corps. Il est responsable des corvées ( charbon, bois, tourbe, chandelle ...) des ustensiles du corps de garde ( pelles, capote de toile ronde encapuchonnée pour protéger les gardes l'hiver, du falot ou lanterne).

 

L'ansepessade est un simple soldat qui à haute paye

 

IV.1.3 L'homme de troupe:

 

Le fusilier est l'homme de base. Illettré le plus souvent, il est recruté de façon souvent malhonnête; quelques pintes de vin, quelques écus, la promesse d'un uniforme et du couvert et d'une solde régulière permet d'abuser facilement le journalier ou le commis. Promesses qui non tenues entraînent une désertion importante, le maraudage et le vol pour subsister. Le soldat est malheureusement à l'image de ses officiers. Après Rossbach le comte de Saint Germain écrit à Pâris Duverney en ces termes " je conduis une bande de voleur et d'assassin à rouer, qui lâcheraient le pied au premier coup de fusil et qui sont toujours prêts à se révolter. Jamais il n'y à rien eut d'égal."

 

Le grenadier est tiré des fusiliers, on les choisit d'abord par leur taille, leur carrure et leur belle tournure avant leurs qualités militaires. Par l'ordonnance du 8 avril 1718, le capitaine des grenadiers doit donner 25 livres au capitaine dans la troupe duquel il aura tiré le grenadier pour la levée d'un autre soldat.

 

 

Jean-Louis Vial