C'est au cours de la Guerre de Sept Ans que s'étend l'uniformisation de la tenue des officiers supérieurs attachés à l'état-major. Déjà commencée par l'ordonnance de février 1744 pour les lieutenants généraux et les maréchaux de camps, elle se poursuit avec celle de mars 1757 pour les officiers de l'état major des armées et les aides de camp et enfin celle de novembre 1757 pour les officiers de l'état major des places. L'ordonnance du 2 septembre 1775 " Sur l'uniforme des officiers généraux et autres employés dans ses armées et dans ses places " reprend les textes précédents sans modifications majeures, mais en y apportant beaucoup plus de précision évitant ainsi les dérapages vestimentaires que permettait une réglementation trop imprécise, et qui faisait écrire au marquis du Muy en 1766 " .... Sa Majesté ne jugerait-elle pas à propos de fixer l'uniforme des officiers généraux de ses troupes. La nécessité en est démontrée par la diversité si grande qu'entre 540 lieutenants généraux et maréchaux de camp qui existent aujourd'hui, il n'y en a pas deux dont l'uniforme se ressemble .... Les uns par vanité l'ont enrichie en l'élargissant et en y mettant des paillettes, de la frisure et des bouillons; les autres par épargne en ont diminué la largeur, d'autres y ont ajouté une baguette qui borde mieux, mais qui n'était pas dans le modèle, d'autres en ont formés de petits parce que les grands leur ont paru trop chers; d'autres ont ajouté des collets renversés, d'autres en ont mis de droit; d'autres ont mis des vestes rouges, d'autres des vestes jaunes dont la couleur est très aisée à salir et donne peu de ressort à l'or. Tous enfin décèlent, même dans un age avancé, la légèreté qu'on voudrait n'avoir à imputer qu'à la jeunesse de la nation. ."

LIEUTENANTS GÉNÉRAUX ET MARÉCHAUX DE CAMPS

Ordonnance du 1er février 1744 qui règle la tenue des officiers généraux en service aux armées du Roi: " Sa Majesté considérant l'importance dont il est que tous les officiers généraux employez dans ses armées, soient en toute occasion promptement reconnus. Sa Majesté à jugé nécessaire de leur régler un habillement uniforme. En conséquence elle à ordonné que ses lieutenants généraux et maréchaux de camps seront tenus de porter pendant tout le cours de la campagne, un habit non croisé de couleur vulgairement appelée bleu de Roi orné d'un bordé de broderie d'or en forme de galon; conformément à l'échantillon qui restera annexé à la minute de la présente ordonnance: avec la seule différence entre les lieutenants généraux et les maréchaux de camps, que les premiers auront le bordé double sur les manches et sur les poches et que les Maréchaux de camp n'auront que le bordé simple." Les tableaux des officiers généraux de l'époque permettent de compléter cette brève instruction, en particulier la veste et la culotte sont rouges, le galon qui borde l'habit, la veste et les poches est du même dessin " en volutes " que celui reprit dans l'ordonnance de 1775 mais souvent sans baguette.

 

Le tableau conservé au chateau du Touvet (Isère), peint en 1756 par Bourchenu , représente le marquis de Monteynard en lieutenant général, il est une illustration du règlement de 1744 et de son interprétation.


 

 

Détail du tableau
Dessin du motif de la veste

La tenue du marquis de Monteynard se décrit ainsi : habit bleu non croisé est bordé sur le devant d'une broderie à motif en volute sans baguette, la poche est bordé de 2 rangs de même broderie sous la poche et un rang sur la patte de poche, le parement est brodé de deux rangs de broderie et trois boutons, la veste rouge est brodée d'un large galon or, parcouru par une branche feuillée également brodé d'or, la patte de poche est brodé d'un même motif. Les boutons sont semblables à ceux du règlement de 1775. Le chapeau est bordé d'un large galon or sans motif distinct, sur la corne postérieure on trouve une petite ganse d'or et un bouton semblable à ceux de l'habit, sur le bord interne du galon du chapeau on distingue un plumeti blanc.

Il n'est rien dit dans l'ordonnance de 1744 de l'équipage du cheval des officiers généraux, les tableaux de cette période montrent de riches selleries rouges à galon et franges d'or, ou parfois bleues galonnées d'or. A ce sujet voici ce que prescrit l'ordonnance de 1775: " l'équipage du cheval composé de housse et de chaperons, sera de velours cramoisi, brodé du dessin de la broderie uniforme. Les lieutenants généraux auront une double broderie vulgairement appelée à la bourgogne; savoir, une réduite de dix lignes, laquelle sera précédée d'une baguette large de deux lignes; et une large de vingt-deux lignes qui n'aura point de baguette. Les maréchaux de camp auront une seule broderie large de vingt-deux lignes, précédée d'une baguette de deux lignes de largeur."

MARÉCHAUX DE FRANCE

L'ordonnance de 1744 ne mentionne pas de tenue réglementée pour les maréchaux de France mais les tableaux de l'époque nous montrent un uniforme semblable à celui des Lieutenants généraux plus richement brodé, en particulier avec des broderies sur les coutures des manches et du dos jusqu'à la taille, ainsi que trois galons sur les parements.

 

Comme marque de leur titre les maréchaux de France ajoutent derrière l'écu de leurs armes deux bâtons de maréchaux fleurs de lyssés passés en sautoir. Le doyen des maréchaux en souvenir de la charge de Connétable qu'il perpétue accompagne ses armes d'un dextrochère armé d'une épée. A propos du Bâton de maréchal: le Duc de Luynes dans ses Mémoires à la date du 10 avril 1758 écrit " Monsieur le maréchal-duc de Belle-Isle a présenté au Roi qu'il convenait d'avoir des bâtons faits exprès pour donner aux Maréchaux de France le jour de leur serment, et en conséquence en à fait faire qui furent donnés dimanche dernier. Ces bâtons sont pareils à ceux que les maréchaux de France portent à leurs armes" . Roussel et Montandre dans l'État Militaire de 1759 nous en donne la description " lorsque le Roi élève quelqu'un à ce grade il lui remet un Bâton de 20 à 22 pouces de long, d'un pouce de diamètre, couvert de velours bleu de Roi, semé de fleurs de lis d'or ( 36 fleurs de lis disposées en quinconce, en six rangées de six, tournées par moitié vers chacune des extrémités ) brodées en relief et terminé à chaque extrémité par un cercle d'or large de trois à quatre lignes, sur lequel sont gravés ces mots " TERROR BELLI " ( terreur pendant la guerre ) et à l'autre extrémité " DECUS PACIS " ( ornement durant la paix ). Fait exceptionnel, il existe encore trois bâton de maréchal de France donnés lors de la guerre de sept ans, il s'agit ceux des maréchaux de Richelieu, de Contades et de Broglie.