Les armoiries des souverains
du Royaume-Uni de Grande-Bretagne
de 1660 à 1760
 

par A.Bunel

Entre la Restauration de Charles II et le règne de Georges II, la Grande-Bretagne aura connu en juste un siècle, trois dynasties souveraines. Chaque dynastie, et parfois chaque souverain marqua son règne par des particularismes dans le blason royal. C'est cette évolution que nous nous proposons de voir ici.

I. La Restauration des Stuart

Charles II (de 1660 à 1685)

A la mort de Cromwell, le peuple anglais hésita peu de temps et accepta la restauration des Stuart en la personne de Charles II qui sera couronné en 1660.

Le blason de Charles II, est identique à celui qu'avait adopté son grand-père, lorsqu'il monta sur le trône d'Angleterre sous le nom de Jacques Ier.

 

Charles II

Il s'agit d'une composition des blasons d'Angleterre, de France, d'Ecosse et d'Irlande. Sa description héraldique est : Ecartelé 1 et 4 : contre-écartelé d'azur, à trois fleurs de lys d'or (France) et de gueules, à trois léopards d'or (Angleterre) ; 2, d'or, au lion de gueules, enfermé dans un double trescheur, fleurdelisé et contre-fleurdelisé du même (Ecosse) ; 3, d'azur, à la harpe d'or, cordée d'argent (Irlande).

A ceux qui pourraient s'étonner de voir représenter le blason de France dans ces armoiries, nous rappellerons que depuis la Guerre de Cent Ans, les Rois d'Angleterre portaient aussi le titre de Roi de France (ils le porteront d'ailleurs jusqu'à la révolution française) auquel ils auraient eut le droit si pour les en écarter, il n'avait pas été décidé d'adopter en France la Loi Salique.

Jacques II (de 1685 à sa déposition en 1689)

Charles II n'ayant pas d'enfant, la couronne passa à son frère, qui fut couronné sous le nom de Jacques II, qui pendant son cours règne utilisera les mêmes armes que son frère.

Nous ne nous intéresserons pas ici aux raisons politiques et religieuses qui poussèrent des notables du pays à le déposer et à faire appel pour le remplacer à son neveu et gendre Guillaume d'Orange-Nassau. Toujours est-il qu'en 1689, une nouvelle dynastie s'installe sur le trône de Grande-Bretagne.

II. L'éphémère dynastie d'Orange-Nassau

Guillaume III et Marie II (de 1689 à 1702)

Guillaume est Prince d'Orange et Stadhouder des Pays-Bas depuis 1672. En 1677, il épousa Marie, fille aînée de Jacques II. C'est pour cette raison qu'en 1688, les notables de Grande-Bretagne à la recherche d'un prince protestant firent appel à lui pour déposer Jacques II. Il débarqua en Grande-Bretagne à la tête d'une armée, et Jacques désemparé, préféra fuir évitant ainsi une sanglante révolution. De la sorte, en 1689, le Parlement offrit à Guillaume la couronne de Grande-Bretagne et celui-ci fut avec sa femme couronné co-souverain du Royaume (sous les noms de Guillaume III et de Marie II). On notera que cette méthode permettait de concilier la continuité dynastique, Marie était une Stuart, avec les désirs du Parlement, qui rendait obligatoire l'appartenance à la religion protestante pour tout souverain britannique.

En tant que Prince d'Orange, stadhouder des Pays-Bas, Guillaume portait les armes suivantes :

 

Guillaume, Prince d'Orange et Stadhouder des Pays-Bas

Ce blason se décomposait ainsi : Ecartelé : 1, d'azur, semé de billettes d'or, au lion du même, armé et lampassé de gueules, brochant sur le tout (Nassau) ; 2, d'or, au léopard lionné de gueules, armé, lampassé et couronné d'azur (Katzenellenbogen) ; 3, de gueules, à la fasce d'argent (Vianden) ; 4, de gueules, à deux lions léopardés d'or, armés et lampassés d'azur (Dietz) ; sur le tout : écartelé 1 et 4, de gueules, à la bande d'or (Châlon) ; 2 et 3, d'or, au cor de chasse d'azur, virolé et lié de gueules (Orange) ; sur le tout du tout, cinq points d'or, équipolés à quatre d'azur (Genève).

Lorsqu'il accéda au trône britannique, Guillaume combina un nouveau blason :

 

Guillaume III

Celui-ci consistait en une reprise du blason des Stuart (continuité dynastique oblige) avec le blason familial de Nassau sur le tout.

La dynastie de Nassau ne pu toutefois pas s'installer. En effet, Marie II et Guillaume III étant mort sans héritiers, la couronne passa à la sœur de Marie, Anne.

III. La dernière Stuart

Anne Ière (de 1702 à 1714)

L'avènement de la Reine Anne, menait au trône la dernière Stuart protestante, elle-même épouse d'un prince protestant, George, Duc de Cumberland, fils de Frédéric III, Roi de Danemark (à ne pas confondre avec l'autre Duc de Cumberland qui s'illustrera un peu plus tard sur les champs de batailles européens).

Bien que Stuart, le blason d'Anne marque une évolution notable dans sa structure.

 

Anne Ière

En effet, bien que reprenant les mêmes quartiers que précédemment, ceux-ci s'organisaient de manière différente : Ecartelé : 1 et 4, d'Angleterre mi-parti d'Ecosse ; 2, de France ; 3, d'Irlande. On voit ainsi apparaître l'unité de la Grande-Bretagne, par la réunion des Royaumes d'Angleterre et d'Ecosse, et donc, ce blason revendique maintenant 3 couronnes, Grande-Bretagne (prépondérante), France et Irlande.

Son fils Guillaume étant mort avant elle, Anne ne laissait pas d'héritier direct. Pour respecter la règle qui voulait que l'on ne puisse choisir le nouveau Roi que dans un lignage protestant, la couronne échut à un petit-neveu de Charles Ier, Georges-Louis, fils d'Ernest-Auguste, Duc de Brunswick-Lunebourg et Electeur de Hanovre.

IV. Une nouvelle légitimité : la Maison de Hanovre

Georges Ier (de 1714 à 1727)

Georges-Louis était Electeur de Hanovre depuis 1698, lorsqu'en 1714, il est couronné en Grande-Bretagne, sous le nom de Georges Ier.

Avec lui, le blason royal change profondément :

 

Georges Ier

En effet, il devient : Ecartelé : 1 ; d'Angleterre mi-parti d'Ecosse ; 2, de France ; 3, d'Irlande ; 4, tiercé en pairle renversé : 1, de gueules, à deux léopards d'or (Brunswick) ; 2, d'or, semé de cœurs de gueules, au lion d'azur, brochant sur le tout (Lunebourg) ; 3, de gueules, au cheval gai d'argent (Hanovre) ; sur le tout du quartier ; de gueules, à la couronne de Charlemagne d'or (Architrésorier de l'Empire).

Ainsi donc, apparaît clairement la double fonction de souverain britannique et de souverain (et Electeur) impérial.

Georges II (de 1727 à 1760)

Georges II, fils de Georges Ier, utilisa le même blason que son père, marquant ainsi la volonté d'ancrage et d'intégration de la nouvelle dynastie.

Si bien entendu, nous ne nous sommes pas attardé sur les considérations politiques qui ont accompagné ce siècle de l'histoire britannique, la simple présentation de son évolution héraldique nous laisse tout de même entrevoir les grands bouleversement qu'a connu cette période.


Héraldique Européenne