La Cavalerie Française de la Guerre de Sept Ans 

Uniforme du Cavalier

par Jean-louis Vial

La tenue du cavalier de la Guerre de Sept Ans est principalement réglée par l'ordonnance du 1er juin 1750. Beaucoup d'éléments de l'équipement restent définis par l'ordonnance du 28 mars 1733. Les modifications apportées par l'ordonnance de 1762 réformant l'organisation et en partie l'uniforme de la cavalerie n'entrera en application qu'après la fin de la guerre.

Les distinctives des différents régiments est plus simple que pour l'infanterie. Elle porte sur les couleurs affectées aux régiments parements, collet, revers et les équipages et leurs galons.

Les sources principales consultées sont les ordonnances de 1750 et 1762, les États Militaires de Lémau de la Jaisse de 1730 à 1745 , les Institutions militaires de La Porterie de 1754, les États Militaires de Roussel et Montandre de 1757 à 1764, le dictionnaire militaire de La Chesnaye des Bois éditions de 1751 et 1759, les Essais sur la cavalerie de Drumont de Melfort, d'Hauteville des Amourettes.. et bien sur les études de Lucien Rousselot, de Michel Pétard ...

Chapeau, bonnet et cheveux

Le chapeau est fait de laine d'agneau noire, il a une forme de 4 pouces de haut avec 9 lignes de plus pour les ailes. Comme pour les autres corps, depuis le début du siècle et suivant la mode prussienne les cornes du chapeau se verticalisent en particulier celle de devant. Le chapeau est bordé d'un galon argent à cheval sur le rebord du chapeau, sa largeur est différente selon le grade, pour le cavalier il est large de 16 lignes (3,6 cm) dont 12 lignes sur le rebord externe, tandis que pour le maréchal des logis il est de 20 lignes dont 16 lignes au rebord extérieur.

Au combat il est renforcé d'une calotte de fer qui se met par dessus afin de protéger la tête des coups de sabre, La Chesnaye précise qu' il y en à de fer, de fer battu, de mèche de cuir, et "que chacun les porte selon son goût".

La cocarde est faite de ruban ou en papier. On en voit des blanches ou noires au XVIIIème siècle sans qu'il soit possible de déterminer ce qui à fait le choix de l'une ou l'autre couleur. Pour Beneton depuis le siècle de Louis XIII, la rose de ruban blanc au chapeau à été constamment la marque des guerriers. La cocarde est maintenue en place sur le bord de l'aile gauche du chapeau par un ruban de soie noire fixé par un petit bouton.

Le bonnet d'ourson est introduit dans la cavalerie française par les régiments allemands comme Royal Allemand, Royal Cravattes .. .
Les Cuirassiers du Roi l'adoptent dès 1750 puis après 1758 certaines compagnies de cavalerie française portent également le bonnet d'ourson, c'est le cas notamment pour Orléans, Penthièvre, Royal Pologne, Fitz James ou de la Cavalerie Liégeoise. C'est un bonnet de poil de couleur marron foncé ou noir, d'environ 30 cm de haut, orné d'une double tresse terminée par une houppette. Dans certains régiments le fond s'agrémente d'une flamme de couleur bordée d'un galon. De même l'avant du bonnet peut être chargé d'une plaque de métal comme c'est le cas du régiment des Cuirassiers du Roi

Les soldats ont en outre un bonnet de travail, le modèle décrit est tiré de l'ouvrage de Drumond de Melfort, gravé vers 1750. Les planches de cet ouvrage concernant les exercices de la cavalerie au casernement, nous montrent ce bonnet sous tous ses cotés.

Le bonnet est en tissu de la couleur du fond de l'habit, bordé d'un galon de la couleur distinctive, sur l'avant du bonnet est fixé une sorte de visière relevée, plus haute que le fond du bonnet qui peut s'agrémenter d'une ou trois fleurs de lis dessinée par un fil brodé de la couleur distinctive.

Comme pour les dragons il a une flamme qui retombe sur le coté et terminé par une houppe de même couleur.

 

Les cheveux sont " au naturel ", c'est à dire peu soignés, liés en tresses ou en queue et maintenus dans une bourse de tissu noir.

Habit, veste, culotte et manteau

L'habit ou juste au corps est fait de drap bleu pour tout les régiments royaux, et de teinte gris-blanc les autres régiments sauf le régiment de Conti dont l'habit est couleur gris de fer, et enfin rouge pour quelques uns: Colonel Général, la Reine, Harcourt, Fitz James et Noailles.

L'habit s'agrémente de revers qui s'arrêtent au niveau des poches, ils mesurent 48,6 cm de long et sont large de 10,8 cm en haut et 7,2 cm en bas.

Notons qu'aux régiments Royal Allemand, Royal Cuirassiers et Royal Carabiniers l'habit n'a pas de revers mais que Royal Carabiniers devenant propriété du comte de Provence prend des revers en 1758. Les poches sont placées en travers (horizontalement).

Le collet se porte relevé, il mesure 3 cm de haut et ferme par un petit bouton.

L'habit est fermé par 38 gros boutons: 7 boutons sur chaque revers, 4 sur l'habit au dessous du revers à gauche ( boutonnières à droite ), 4 sur chaque fausse poche, 2 à la taille et 2 pour fermer les plis de l'habit en bas, 4 boutons sur les parements en botte 3 petits boutons, 2 petits boutons pour maintenir les épaulettes, 1 petit bouton au collet.

Les pans se portent retroussés, maintenus par une agrafe ce qui laisse voir des retroussis de couleur.

Sous l'habit le cavalier porte le buffle, sorte de veste faite de peau il assure une excellente protection. De couleur chamois il ferme sur le devant par des agrafes. Le buffle à un petit collet droit fermant par un petit bouton. A l'imitation des troupes prussiennes il est bordé d'un galon de livrée. Les manches sont fendues à la marinières et fermées par trois petits boutons. A l'extrémité des manches est cousue un petit parement de drap rouge de 2 pouces et demi de hauteur ( 5,7 cm ). Rappelons que d'après l'ordonnance seul le régiment Royal Cuirassiers porte la veste au lieu du buffle. Ici encore des dessins de cette période nous montrent des régiments portant la veste de couleur au lieu du buffle, elle prend alors la couleur des parements.

Sur l'habit le cavalier porte deux épaulettes de laine composées des couleurs du galon de livrée. La languette reprend le motif du galon et la frange est faite des couleurs mêlées de ce même galon. L'épaulette est maintenue en place par un petit bouton près du collet et par une contre-languette. Elles évitent aux banderoles du mousqueton et de la giberne qui sont passées sous les épaulettes de glisser.

Les " éguillettes " théoriquement supprimées continuent d' être portées comme le montrent les dessins et peintures du temps ( Becker , manuscrit de Bouxwiller .. ) et comme l'écrivent les contemporains comme Beneton de Morange dans son traité des marques nationales ou La Chesnaye dans son dictionnaire de 1759 qui indique :" leurs couleurs différentes pour l'ordinaire de celle qui habille la troupe, fait qu'elles servent comme d'un sur-uniforme, par le moyen duquel chaque commandant peut communiquer sa livrée au corps qu'il commande indépendamment de l'uniforme constant de ce corps, cette particularité est confirmée par les planches de M. Forthofer tirée du manuscrit de Bouxwiller.. Enfin précisons que " les éguillettes de la cavalerie sont plates, et celles des dragons sont rondes."

Les culottes sont de peau couleur chamois. Elles sont à double ceinture ou pont-levis fermées aux hanches par des boutons et aux genoux par des boutons sur l'extérieur de la jambe et une boucle sous le genou.

Pour prévenir l'usure et la souillure de la culotte par le frottement de la botte, le cavalier met au niveau du genou une manchette de botte.

Pour le service à pied le cavalier possède une culotte de panne qu'il porte avec des bas et des chaussures. Nous n'avons pas d'indication sur la couleur réglementaire de cette culotte, aussi prendrons nous deux exemples. Tout d'abord le portrait de M. de Bullioude officier des Carabiniers d'après Carmontelle qui porte une culotte noire puis l'exemple tiré de l'inventaire des effets de M. de Bovet mestre de camp lieutenant d'une brigade au régiment des Carabiniers tué à Minden le 1er août 1759 et qui possédait dans ses bagages une culotte de velours noir et une culotte écarlate.

Le manteau est fait de drap de couleur chamois avec un large collet. Il se ferme par des agrafes et est orné sur le devant de trois agréments en galon cousu en fausses boutonnières de chaque côté du manteau. Il se fixe soit dessus soit dessous le portemanteau à l'arrière de la selle.

Les bottes de cuir noir sont dites molles pour les cavaliers et les brigadiers. Elles n'ont pratiquement pas changées depuis le règlement de 1733, seul l'éperon à été renforcé et la genouillère modifiée.

Les gants, de cuir épais et robuste, constituent un élément très important de la protection de la main du cavalier. Ils sont à manchette et de couleur ocre.

Équipement et buffleterie

Suivant l'ordonnance du 28 mars 1733 les bandoulières de buffle à anneau roulant sont de la largeur de 2 pouces 1 ou 2 lignes (6,7 cm ). Le ceinturon de buffle moins large que la bandoulière est piqué simplement dans les bords. La Chesnaye écrit " la bandoulière blanche pour les régiments Royaux seulement et de buffle pour les régiments des Princes et de Gentilhomme, piqué de blanc" c'est à dire au naturel proche de l'ocre clair.

La cartouche est en cuir de Russie (teintée en rouge) et renferme un patron de bois qui peut contenir douze coups, la banderole de buffle piquée.

La cuirasse n'est en fait qu'un plastron de protection du thorax fait de fer battu. La Chesnaye écrit " le devant est à l'épreuve du mousqueton, le derrière (face intérieure) léger grisé et doublé de toile garni d'écailles, de serge de moue bleue ou rouge, et d'un galon d'or ou d'argent faux l'ensemble pesant 118 à 120 livres." C'est l'ordonnance du 28 mai 1733 qui en rend obligatoire le port durant le service. La Porterie en donne un dessin sommaire dans son manuscrit de 1754.

Seul le régiment des Cuirassiers du Roi à une cuirasse complète avec une protection du dos. De même tout les officiers de tous les régiments de cavalerie et la Gendarmerie sont tenus de porter la cuirasse complète.

Petit équipement:

Le détail nous en est donné par La Porterie qui décrit le nécessaire qu'un cavalier range dans la besace ou portemanteau qu'il fixe à l'arrière de la selle. Ce porte manteau mesure environ 113 cm de long pour 43 cm de large, fait de coutil, il comprend un compartiment et deux petites poches.

Il contient pour l'entretient du cavalier: un gilet, trois chemises, trois mouchoirs. Une culotte de panne avec une paire de bas et une paire de souliers pour le service à pied, et une vieille paire pour l'écurie, un bonnet de drap, une cravate, un ruban de queue, une paire de guêtre, une paire de manchette de botte, un sac à poudre, sa houppe et poudre, deux peignes . Et pour l'entretient du cheval il y met encore: un peigne pour le crin, une vergette, une paire de décrottoirs, un licou de revue et de précaution, un bridon d'écurie ou d'abreuvoir, une paire de troussières avec des anneaux de fer, une boite à graisse noire, une paire de ciseau, une étrille, une brosse, une éponge et une époussette.

Auquel il faut ajouter, plié avec le manteau sur la besace, une couverture de cheval, un surfaix, un sac à avoine et un sarrau de toile pour panser le cheval.

Armement:

Le cavalier est armé d'un mousqueton, d'une paire de pistolets et d'une épée.

Le mousqueton de la cavalerie est du modèle 1733-1734, équipé d'une platine d'infanterie raccourcie modèle 1728. Il mesure 107 cm dont 78 cm pour le canon et pèse environ 3kg. La crosse de bois est dite en pied de vache. Toutes ses garnitures sont en laiton, sauf l'écusson, la tringle de suspension et les battants qui sont en fer. La baguette est en bois ferrée à une extrémité. Le mousqueton se porte sur le côté droit de la selle, maintenu canon en bas grâce à un brelage de cuir, lorsqu'il est en vedette ou amener à tirer le cavalier porte son mousqueton fixé au crochet de la bandoulière. Le mousqueton est essentiellement lorsque le cavalier est de service à pied, ou lors de la traversée de bois, de rivières, pour défendre l'entrée d'un village, pour assurer la protection des fourrageurs.

Chaque compagnie de cavalerie comprend 4 carabiniers, soit 16 par escadrons, armés d'une carabine rayée. Elle est identique au mousqueton avec l'âme du canon rayé améliorant la précision du tir.

L'ensemble du régiment des Carabiniers officiers compris est équipé de carabine rayées. A noter que l'armement de ce régiment se distingue encore par un magnifique sabre avec monture à coquille. La Porterie nous apprend que les carabiniers portent la carabine sanglée à la selle, crosse en bas comme le fusil des dragons.

Les deux pistolets sont du modèle 1733-1734 semblable à celui des dragons. Monté avec la même platine que le mousqueton, le pistolet mesure 48,5 cm dont 31 cm pour le canon et pèse 1,2 kg. Ils se portent dans des fontes de cuir passées sur le pommeau de la selle. Le cavalier s'en sert dans la mêlée ou dans la poursuite.

L'arme principale du cavalier reste le sabre. Le texte de l'ordonnance de 1750 est très bref." le sabre à monture de cuivre, à double branche, la lame à dos, 33 pouces de longueur ( 89,1 cm ) ". En fait le modèle est celui de l'ordonnance du 16 janvier 1734 que nous donne Chenevières: la lame de l'épée à double arrête dans le milieu aura 2 pieds 9 pouces de long, la soie non comprise, 16 lignes de large à sa naissance terminant à 8 lignes, à cinq lignes de la pointe. La soye sera de l'épaisseur de la lame, ayant 7 lignes de largeur à sa naissance, elle aura pouces de long et finira en pointe; une pareille lame ne doit peser qu'une livre 5 onces fort. Il est loisible aux troupes de la cavalerie de prendre des lames à un tranchant et à dos, en ce cas les lames ne seront pas à double arrête. La poignée sera droite afin que la soye puisse se river plus solidement. Le pontat du sabre autrement nommé coquille sera assez enfoncé pour qu'il ne gène pas la main du cavalier, la coquille prenant naissance à côté du quillon, sera en forme d'ovale et finira en pointe vers la branche, elle aura 2 pouces 4 lignes de largeur, à prendre dans son centre et sa longueur sera de 4 pouces. Le pontier sera couvert d'une coquille de la longueur de la lame. Il y aura qu'une seule branche qui sera de même que le pommeau proportionné à la monture. La poignée aura 4 pouces de long et sera faite en ovale garnie d'un fil de laiton égal et d'une bonne virole à chaque bout, la garde sera d'un bon cuivre ou laiton et pèsera une livre une once.

La modification principale apportée sur le modèle de 1750 par rapport au modèle précédent de 1734 est une deuxième branche sur la monture qui améliore la protection de la main.

Notons encore que l'ordonnance du 11 janvier 1734 prescrivait un fourreau à deux chapes de bois recouvert de cuir noir" le fourreau sera garni de deux chapes portant chacune un bouton à olive. La première chape commençant à la naissance du fourreau, aura 2 pouces 10 lignes de long, le bouton à 1 pouce neuf lignes de l'ouverture. La seconde aura 2 pouces 3 lignes de long, le bouton placé dans le milieu. Les boutons seront éloignés de 9 pouces." Le fourreau est renforcé d'un bout en cuivre.

Le cordon de sabre mêle les couleurs du galon.

Distinctives des grades des sous-officiers:
maréchal des logis, brigadier, carabinier:

Le maréchal des logis à un bordé d'argent de 2,7 cm sur la housse de son cheval. Son chapeau est bordé d'un galon argent à cheval sur le rebord du chapeau. La largeur du galon est de 20 lignes dont 16 lignes au rebord extérieur

Le brigadier à un double bordé d'argent sur le parement. Chènevière citant le règlement du 28 mai 1733 indique " permet seulement un bordé d'or ou d'argent d'un poids d'une once à la manche des brigadiers".

Le carabinier porte un bordé d'argent de 2,2 cm sur le parement